lundi 7 juillet 2008

Métamorphoses

On vient de voir dans le post précédent (Draft) le classement des consonnes de notre langue. Bien. Maintenant on va s’intéresser aux «métamorphoses» intralibyques si je puis dire, c’est à dire comment le mots mutent-ils avec le temps, quelles sont les lettres les plus aptes à muter, quelles sont les lettres interchangeables ou qui permutent, quels seraient à l’origine des mots modernes que nous utilisons en kabyle ou autre langue régionale «berbère», etc...
Il faut scinder deux types de mutation : 1. passage d’une lettre à une autre au sein du même groupe (il y en a 5 au total) que l’on va qualifier de «variation»; 2. mutation d’un groupe à l’autre que l’on va désigner par «mutation». Cette terminologie n'a rien à avoir avec celle des spécialistes, justement pour éviter les melentendus et rester dans le cadre de ce blog d'un locuteur non-spécialiste.

Tsé – Tsé
Ce type de «recherches» va nous permettre de mieux comprendre les particularités des variétés régionales du «berbère», parfois même l’histoire de notre peuple. Par exemple, au sein du groupe 3 «téta-delta» nous savons que nous les kabyles en majorité nous utilisons le son «TS», par exemple pour le démonstratif (tha meghra/ la fête devient tsa meghra/c’est la fête), alors que nos cousins du sud , de l'est ou de l’ouest utilisent le «T» dans tous les cas (ta meghra/la fête + c’est la fête). On peut relever ce phénomène en Kabylie même, ce qui laisse penser que ceux qui disent ta meghra seraient venus ou influencés par ceux venus du sud, de l'ouest ou de l’est. Le «TS» ou appellons-le T-sifflant serait une particularité des parlers du nord (Numidie maritime) et ce phénomère est aujourd'hui existant aussi chez les arabisés ou arabes à l’est de la Kabylie, précisément à Jijel oû ils continuent à utiliser le «ts» en prononçant le T de leur dialecte «arabe»-algérien. C’est pour celà que les gens d’autres régions chambrent les jijeliens «tsék-tsék Jijel», d’ailleurs rappellez-vous le personnage excentrique de «l’inspecteur Tahar» et son accent jijelien.
Il est à noter que dans certaines langues européennes (russe, français, anglais) le T, surtout à la fin du mot comme dans le mot "miette", est très «soft» et légérement sifflant. Pourquoi alors appelle-t-on ce son sifflant «TS» un son affriqué?!

Jojo – Gigi
Jijel peut aussi témoigner d’un autre phénomène: nous n’avons pas en libyque/«berbère» de «dj» comme en anglais/italien ou arabe et dans les mots empruntés, sémites-arabes surtout, nous le remplaçons par un «zh» ou « j » (en français) : al-djamia devient tha-jmaat, al-djiib devient l’jiv, etc...Nous disons Jijel ou a-Jijeli (zhizhel / a-zhizhli) et les arabes ils disent Djidjel (c’est la toponymie officielle). Maintenant il faut savoir que les gens de l’ouest algérien (Oran-Mosta-Tlemcen, etc...), les marocains aussi à ma connaissance, dans leur dialecte arabe ou daridja ne prononcent pas non plus le «dj» sémite-arabe et le remplacent par «j» («zh»)! Je ne sais si vous connaissez la fameuse expression des gens de l’ouest: « jit wella jabuk» pour dire « t’es venu (de ton gré) ou l’on t’a fait venir/on t'a ramené», façon d'ironiser "qu'est ce que tu fais là toi?!", que l'on retrouve chez certains en kabyle "thu sidhed nagh dha kuli (côlis)". Belles expressions, hein ?

RâLant!
J’ai remarqué que nos cousins du Rif «remplacent» systématiquement le L par le R : uL devient uR pour appeller "le coeur", etc...les exemples sont nombreux. Il doit bien y avoir une raison. Dernièrement un spécialiste en linguistique me disait que les asiatiques (viêts et autres) ont d’énomes difficultés à aprendre les sons russes R et L pour certains et R surtout (viêts, chinois et autres) car ces sons n’existent pas dans leurs langues. J’ai moi-même remarqué que 1. en kabyle il n’y pas de mots oû le R et le L se suivent et à première vue très peu de mots contenant un R + L (candidats à être des emprunts?) ; 2. en kabyle et même en argot «arabe» algérois on a toujours tendance à permuter le R et le L: on dit «ritla» au lieu de «litre ou litra», parfois «larkul» au lieu de «l'alcool». Donc il y a tendance et forcément il doit y avoir une raison. On essayera de la dénicher avec le temps mais pour le moment j’ai compris la raison "géométrique" de cette incompatibilité du L et R à «vivre ensemble»...mais celà est insuffisant et peu convaincant pour le public.

Les exemples que l’on vient de voir sont des particularités, des «variations». Dans les post qui vont suivre on va voir les «mutations» d’un groupe à l’autre : j’ai eu la surprise de voir comment le W du premier groupe s’interchangeait ou mutait en Q ou autres lettres du 2ème groupe «gamma». Les premières constatations/«conclusions» seraient prometteuses pour les spécialistes en ...grammaire.

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