samedi 19 juillet 2014

Le Saint-Guide

Le guide des mazighs...

Suite du billet précédent.
On a deux chasseurs qui conviennent à notre thème : 
Orion et le Sagittaire.
Sagittaire
Le sagittaire est aussi un archer, son nom même dérive du latin sagita "flèche".
Notez que c'est un homme au corps de cheval.
Orion
Orion, le chasseur d'après la légende grecque, comme on l'a souligné dans le post précédent.
C'est surtout la constellation d'Orion qui nous intéresse.
Car, comme nous allons le voir, le baudrier du chasseur Orion revêt un sens particulier pour nous les Mazigh d'Afrique du Nord. 

Amanar
Orion, comme souligné dans le billet précédent, est un cardinal, un repère pour s'orienter. Au Nord les Kabyles et autres Rifains ont tourné le dos à la mer, et aux termes de navigation et orientation par la même occasion. Par contre au Sud, nos frères et cousins Imouchaghs (Kel Tamacheq dits Touaregs), avec leurs vaisseaux du désert, demeurent toujours de bon voyageurs et s'orientent parfaitement en utilisant la voûte céleste.
Pour ne pas perdre le Nord, les Kel Tamacheq utilisent la constellation d'Orion qu'ils appellent Amanar pour retrouver l'étoile polaire indiquant le Nord. Orion est tout simplement Amanar en Tamacheq.

Amenay
Vous savez, les histoires de chevaliers des Européens occidentaux, prises pour argent comptant par l'écrasante majorité des Européens - ceux de l'Est (ex.Russie) ayant même développé un complexe d'infériorité par rapport aux Français et autres Anglais à ce sujet pour cause d'absence de tels chevaliers dans leur histoire - ont beaucoup en commun avec...les contes kabyles. Perso j'y crois pas à ces légendes données pour être des histoires de chevaliers, surtout ceux de la foi avec la croix ressemblant étrangement à la flèche du sagittaire. Pis encore, ces histoires des mêmes Européens post-Romains sur les redoutables archers montés Huns ou Mongoles ; encore une autre version de Sagittaire ? Le chevalier (a-menay) est avant tout sur une monture, il est cavalier (regardez maintenant le symbole du Sagittaire plus haut).  
Autrement dit, la légende est la même ou semblable, sauf qu'est elle est restée dans sa cosse de mythe chez les Kabyles et, au contraire, elle est sortie du mythe pour devenir une histoire officielle chez les Européens post-Romains. 

Mais à quoi ressemble cette légénde des chevaliers ? Voyons la version kabyle, loin des récupérations des Etats ou des Clergés. D'abord, chez les Kabyles, un amenay (chevalier) est d'office noble.
Ensuite, le happy-end d'un conte kabyle, lorsque le personnage est dans une impasse ou devant un danger, qui lui vient au secours ? Les hommes qui tombent à pic : i-menayen, les chevaliers, bien évidemment.
Amenay, i-menayen (plur.) : chevalier (s), cavalier(s) en kabyle, en chaoui, etc.
Ce chevalier a-menay est simplement le sauveur. Il est question de Salut.
Cette notion de sauveur occupe une place centrale dans la mythologie devenue religion des Européens post-Romains (Christ le sauveur), avis à qui veut l'entendre.

Azemni
Toujours dans la mythologie kabyle, celui auquel on s'adresse pour sortir d'une impasse s'appelle comment ? Amghar azemni, traduit, à tort à mon sens, comme "le grand sage" alors qu'il est plutôt "le grand oracle" ou qlq chose de proche. Le terme ameghar pouvant indiquer "vieux" (nom) comme "grand, le plus grand, suprême" (adjectif), et a-zemni détient la sagesse et surtout il contient la racine ZM de lion donc de chasseur, meneur, celui qui indique le repère et oriente les gens, bref, d'Orion (lire le post précédent).  
Bref, a-zemni serait probablement le guide, donc a-mghar a-zemni serait "le grand guide"
Cette notion de guide occupe aussi une place importante autant dans les religions que dans l'espace politico-social de presque toutes les sociétés (guide suprême, guide de la révolution, guide-gourou religieux, etc.).

Moulay
On va dans le pays de nos frères du Rif, le pays du grand héros Moulay Muhand de son nom Mohammed Ben Abdelkrim El-Khattabi. Il est désigné moulay  c'est un titre mazigh repris par la monarchie arabo-islamiste marocaine au sens de seigneur au lieu de l'arabe Sidi ou Syid. En réalité, Moulay, en plus d'être seigneur et noble d'office, serait aussi un Amenay (chevalier = Sauveur), un Azemni (guide) et donc au final, le chef suprême : chef de guerre + guide spirituel.
L'équivalent arabe du Moulay amazigh serait Sidi, Sayid (Seigneur) ou/et Morchid (le guide)  ou, plus vraisemblablement, Emir qui normalement est épaulé de chef spirituel.

Les racines diverses mazigh d'horizons divers sont mise dans le même panier :
MNR en tamacheq : a-manar "le guide", "Orion";
MNY en kabyle et chaoui : a-menay "chevalier" (sauveur ?)
ZMN en kabyle : a-zemni "sage, oracle, guide ?"
Et voir plus : 
ML : mel : montrer, indiquer.
MLY, MLL en kabyle/mazigh : a-mellal, a-mellal "le blanc". 
Le blanc est plutôt noble chez les Kabyles du moins. Il faut essayer de faire la popotte avec tous ces ingrédients pour essayer d'y voir plus clair. 

San Salvador
J'avais partagé avec vous, chers lecteurs, mes doutes quant à la véracité des faits rapportés sur la découverte des Amériques par Christoph Colomb. Outre l'histoire elle-même, il y a le prénom Christoph (Cristobal) qui tient du Christ, le nom Colomb qui pourrait être en relation avec la colombe - symbole du Saint-Esprit chez les Chrétiens, mais aussi et surtout le nom du premier lieu qu'il a découvert en mettant les pieds dans "le nouveau Monde" est curieux de par son nom :San Salvador.

1) D'abord, c'est une Île, qui, comme on l'a vu sur ce blog, pourrait revêtir un sens particulier en terme de religion et mythologie ;

2) Ensuite, il y a San Salvador (Saint Sauveur), ce Salvador-Sauveur serait peut-être bien un repère géographique pour navigateurs, au même titre qu'Orion (a-manar) pour le voyageur Tamacheq/Touareg, don simplement Salvador (Sauveur) serait un équivalent d'Orion ou carrément le Sagittaire. 

Ce ne serait pas une flèche (symbole du Sagittaire) ou une épée (comme l'épée d'Orion) mais carrément une croix, peut-être la Croix du Sud - qui est en qlq sorte l'étoile polaire dans l'hémisphère Sud, très utilisée d'ailleurs par nos frères Imouchaghs (Kel Tamacheq dits "Touaregs") qui la désigne par Tenegelt tan Agadez, la croix d'Agadez -, en tout cas un repère, peut-être un repère utilisé par les marins espagnols pour gagner les Amériques. 

Il faut comparer aussi à la date avancée, le 12 octobre 1492 pour peut-être trouver un parallèle avec un phénomène céleste (par rapport à Orion, au Sagittaire ?) ayant servi de repère aux marins pour situer cette date de "cet énorme événement" dans le temps. Orion ou Sagittaire comme repère, c'est aussi la flèche (ou la croix ?) qui, comme on l'a vu dans le billet précédent, serait une flèche indiquant une direction, servant d'orientation: une boussole quoi !, c'est le meilleur guide, le saint guide des navigateurs :)))
On y reviendra dès qu'on aura plus d'indices.

P.S.
Par rapport à ce billet et au précédent.
On a vu pourquoi i-zem pour lion en kabyle notamment (izem = septem = 7).
Alors où se retrouvent le nord et le sud mazigh, le kabyle et tamacheq, par exemple ?
Ben, ahar "lion" en tamacheq (touareg) est le même que dans nehar n'her "conduire" en kabyle !  Le lion serait bien un repère d'orientation, un guide (= un conducteur)...donc apparenté à guidon, gouvernail. Et cette racine mazigh, HR de lion (ahar en tamacheq) et de conduire (n'her en kabyle) serait comparable au latin Duc (viaduc, par exemple) de Dux apparenté à...Duce (leader, dirigeant) :)))
Voici donc une racine pan-berbère, dont l'équivent (en partie) latin est identifié, à exploiter de nos jours. 

.LIRE LA SUITE DE CE BILLET "Le seuil d'Orion".