D’abord le nom Hammouda, il n’existe qu’en Afrique du Nord, il est surtout omniprésent en Kabylie sous des formes diverses : Aït-Hammouda (arabisé en Ben-Hammouda, Ould Hammouda), Hammoudi, Hammidi-Hammiti, Hammedane-Hammoutène, etc...Ce nom patronymique est issu d’un toponyme normalement, c’est la règle chez nous. La forme utilisée pour les prénoms et les sobriquets c’est Hemmou pour «qlq’un de chaud» et «qui s’emporte vite», tout ça à cause du mot kabyle hammu « chaud », voir hemmu, sehemmu = réchauffer, chauffer ; de hammu (chaleur) serait issu le mot hemmam (thermes, bains-maures) seulement le mot kabyle et mazigh a été arabisé en partie avec ce «h» intrus qui le dénaturise.
Ensuite le mot jaR, djaR (voisin) en kabyle, mazigh et en argots nord-africains se retrouve il est vrai en arabe al-djar (voisin) mais celà ne signifie pas que c’est un mot arabe à l’origine bien au contraire et c’est facilement démontrable. On retrouve ce même mot avec le même sens en...gaulois !
Germain : du gaulois ger « voisin » et man, maon « homme, peuple »
M ~ RM
C’est à dire qu’un R se cacherait devant un M simplement il a disparu avec le temps. On a déjà vu sur ce blog (voir billet Home) que le R rétabli donnerait axRam, akhRam à la place de axxam, akham (maison, foyer). Prenons un bon exemple pour illuster cette formule et l’intrigante relation entre un mot kabyle et son équivalent allemand.
shamma, shama = cicatrice, balafre, stigmate
Avec le R rétabli devant m : shama ~ shRama
Le kabyle shama, shRama (cicatrice) est exactement le même que l’allemand schrame (pron.en fr. chramé) "cicatrice", mot emprunté par le polonais szram et le russe shram.
Cette formule du R restitué devant le M explique que le nom amputé Gamuh (en fr.Gamouh) que l’on retrouve dans l’Est (Annaba, Constantine) est proche sinon le même que Garmah, Germuh, vu-Germuh (en fr. Guermah, Guermouh, Bouguermouh) que nous avons en Kabylie.
Cette formule M ~ RM peut aussi expliquer le mot kabyle hammu (chaleur) qui sera haremmu, haRmu qui d’un côté est proche à la racine de l’arabe har, harara (chaud, chaleur) donc si le mot hammam avait été un mot arabe ils l’auraienta appellé haramam ou hararama ; et de l’autre côté hammu – haremmu est proche du grec thermos (chaud) surtout si l’on se débarasse de l’intrus arabe «h» pour le remplacer par «th» et puis hemmam serait simplement hermam-thermam soit les thermes.
Il ne faut pas généraliser cette formule, nous devons nous assurer dans quels cas précis elle s’applique. Par exemple gma (frère) serait-il germa...un germain ?!
Par ailleurs la fomule M ~ RM avec le R rétabli devant le M peut inversement être interprétée, c’est à dire avec un M rétabli devant le R soit R ~ RM, au final RM serait un couple inséparable ! Cette formule inverse est vérifiée pour l’exemple suivant :
jeReDH, a-jaRiDH, sh’ReDH = tracer (une ligne), une ligne, un trace, une condition
voir aussi hReth (labourer, silloner), kReDH (gratter), nejeR (tracer un chemin).
shereg (déchirer), jereh (blesser, égratigner, causer une plaie)
shReDH ~ shRameDH, jereH, shereh ~ jrameh, shrameh
On revient à notre shama, shRama (cicatrice) générée par la première formule.
Voilà donc pour cette idée avec la nouvelle formule RM. Nous allons terminer ce billet sur un air de musique un peu spéciale. Quelle soit celte, d’ailleurs ou de chez nous je l’adore. Je parle bien sûr de leghidha t’aylewth la cornemuse qui n’est malheureusement pas estimée à sa juste valeur dans la musique folklorique kabyle moderne. Ci-joint un très beau morceau d’un maestro kabyle très peu connu du grand public : cornemuse kabyle
La cornemuse est appellée mezwed par les tunisiens, voici justement la chanson la plus connue de nos voisins ou cousins germains, jouée à la cornemuse: Hammouda