vendredi 10 juillet 2009

Byron

Offtop. On va apporter ce qui manquait à ce blog: une touche de romantisme.

Une touche de baïronisme, une touche de romantisme ne ferait pas de mal à ce blog. Autant avouer que le message qui va suivre n'est pas du poète romantique anglais George Gordon Byron (1788-1824) mais d'un simple grand romantique aux initiales MG.
Ce qu'il y a de particulier dans cette histoire est que ce message date d'au moins 24-25 ans, il a été publié à la rubrique lecteurs d'un hebdomadaire algérois vers probablement fin 1984 ou au printemps 1985. A l'époque j'ai eu tant de sympathie pour ce malheureux romantique MG que j'ai gardé ce message dans mon journal. Aujourd'hui je vais le reproduire intégralement en espérant que tout va bien pour son auteur MG après tant d'années de chagrin et surtout vu que l'Algérie a bien changé depuis 1985 en sombrant dans les ténèbres des haineux et des assassins. Voici donc un témoignage historique de ce qu'était ce pays, juste avant de chuter, via ce témoignage du romantique MG.

Le dernier romantique


Elle a défloré mon âme. Elle a choisi quelqu’un d’autre pour sa situation. La chanson d’Aznavour fait un ravage dans mon cœur. Un cœur qui bat la chamade depuis longtemps. J’y croyais à l’amour moi! J’y croyais à mon étoile ! J’étais heuereux avec elle. J’ai tout misé sur elle, moi. J’ai tout râté à cause d’elle. Quand je reviens dans cette ville, les glandes lacrymales sont en alerte – mon cœur se serre – vais-je la rencontrer ? me dis-je souvent fut-ce au bras de mon rival (maso vous dites ! c’est qu’il y a belle lurette que je l’ai vue. Elle hante mes nuits depuis une décennie. A-t-elle épousé cette riche personne ? ! Ché pas. Qu’est ce qu’elle devient ? Ché pas non plus. Moi je l’aimais passionnément vous savez c’qui’s’passe dans mon âme, dans mes entrailles, seul Dieu le sait – je lui ai juré un amour éternel – Et puis voilà ! Cruel destin ! Voilà ! Elle a choisi ! Elle a choisi le matériel. Pourtant. Pourtant j’la connaissais pas comme ça – moi – Tous les projets qu’on a fait ensemble sont tombés à l’eau. Elle m’avait promis de me donner deux enfants. Pas plus. On écoutait souvent ensemble la chanson de Delpech « fais-moi un bébé »*, on était heureux j’vous le dis ! Non je lui jette pas la pierre. Je lui pardonne. Je lui pardonne tout. Moi ! Toutes ces souffrances que j’endure. Pourvu qu’elle soit heureuse. Pourvu qu’il lui soit rien arrivé de grave. Aimer à perdre la raison a dit le poète. Oui, le poète a toujours raison. C’est dit par le même chanteur. La déception amoureuse c’est le cancer de l’âme. J’vous demande pardon. J’voudrais pas philosophailler. Plutôt jeter des idées comme ça en vrac sur le papier. C’est plus sain. C’est plus honnête. C’est sincère. C’est profond. Ecrire ! Oui écrire jusqu’à ce que mes neurones brûlent entièrement. Me mettre à nu jusqu’à ce que j’en crève. Le jeu des osselets est un jeu passionnant pour les enfants. Je revois encore cette image quand toute gamine elle jouait à ce jeu devant la porte de leur immeuble. Ce qui m’rajeunit pas. Elle non plus. Le temps ça fait beaucoup de choses. Ça fait grandir. Ça fait souffrir. Ça fait mourir. Ça forme. Ça déforme. Oui ça forme ! Elle grandissait et elle commençait à prendre conscience de son corps. Et puis ! Et puis son esprit commençait à gambader. L’esprit en vadrouille. Tac ! La crise de l’adolescence. Les émotions répétées. La petite touche. Le petit flirt. Adieu les osselets. Adieu les jeux d’enfants. On est «adulte» maintenant. Pour moi le jeu des osselets est toujours dans ma tête. A chaque petit caillou j’ai donné une lettre et puis j’ai formé un mot. Le fameux mot magique. Dangereux : Amour. Moi j’nai rien oublié. Tu sais ! « Le vieux du quartier qui est mort est jeune » qu’tu disais en kabyle algéroisé. Et moi je riais à me casser les côtes. T’vais perdu ton latin. Plutôt ton kabyle. Tout ça c’est pas oubliable. Les nouvelles de moi ?! Eh ben moi je suis toujours le même. Je suis un grand enfant. C’est tout. L’homme. La femme. Ce sont de grands enfants. C’est tout. J’espère qu’t’as pas coiffée Ste Catherine. J’espère qu’t’es heureuse. Les nouvelles de moi tu dis ?! Eh ben moi je pense toujours à toi avec un froid intérieur à gercer mon âme. Moi marié !!..Ça va pas non ! Mon amour pour toi est un empêchement au mariage. Je vis avec cet espoir de nous rencontrer dans un autre monde. Les histoires de vie antérieures je sais qu’t’en connais un bout.
J’voulais envoyer ce petit message au journal « libé ». Et puis j’ai préféré notre «2A». C’est un hebdo sympa. A l’écoute de tout. On peut lui faire confiance.
Vivement que cette «lettre» soit publiée. J’ose l’espèrer. C’est mon vœu. Mon très cher vœu. S’il n’est pas exaucé j’naurais plus qu’à tatouer sur mon bras la phrase leitmotiv des marginaux. Des infortunés : PAS DE CHANCE.
M/G le Détenu de l’Amour

* La chanson de Michel Delpech s’appelle « fais un bébé ».

Date de parûtion de ce message: 1984 (automne) ou 1985 (avant l’été) . Hebdomadaire algérois «Algérie-Actualités», appellé AA ou 2A parfois.

Puisqu’il est question de "filles kabyles qui rendent les garçons fous" et d’amour bafoué je vous propose de découvrir l’autre talent de Dda Lwennas Maatoub en écoutant sa chanson tout simplement formidable intitulée yir thayri (amour bafoué), les paroles en kabyle et la traduction vrac en français sont aux «commentaires» de ce clip sur DailyMo, merci à l’auteur de l’upload Nomade_C.