samedi 13 novembre 2010

Marabout

Quand les rabbins sont devenus des marabouts...

Préambule
Le terme marabout en Afrique subsaharienne diffère de marabout en Afrique du Nord d'oû il est originaire. En Afrique noire marabout est gars multitask entre "gourou, toubib, sorcier", alors qu'en Afrique du Nord son sens est tout autre. D'abord marabout était chez les maures (Maroc) arabisés et islamisés utilisé pour désigner la dynastie "berbère musulmane" al-mourabitoune ou les almoravides qui étaient en qlq sorte une caste de moines-templiers berbères (du sud, de l'ouest) islamisés, ce mot serait issu de ribat (temple-forteresse) tiré je suppose du verbe rabet "lier"; il existe aussi comme toponyme Rabat et dans les patronymes des marocains de nos jours: Lemrabet, Tamrabet, etc... En Kabylie il existe une différenciation (entre les villages de) kabyles laïques et (les villages de) la caste des imravDHen "les marabouts" qui ne sont ni plus ni moins que "les gardiens du temple", des gens religieux dévoués à la religion musulmane en l'occurence; on suppose assez souvent que cette caste des imravdhen est apparue assez tard, vers le moyen âge selon certains, en Kabylie grâce aux missionnaires maures (berbères occidentaux) venus de l'Ouest prêcher en Kabylie pour islamiser cette région qui aurait échappé à l'islamisation-arabisation lors des premières invasions arabo-musulmanes venues par l'Est à partir du 7 siècle, c'est à dire les "frères" maures islamisés auraient réussi là oû les arabes auraient échoué car les maures parlaient la même langue ou presque que les kabyles donc ils ont très bien communiqué. Celà reste une supposition, bien entendu, même si le facteur de "prêcheurs maures" en Kabylie est indéniable. Aujourd'hui les imravdhen ont abdiqué et ce sont désormais des salafistes et leur branche armée "les tangos" qui sèment la graine de l'usurpation, l'obscurantisme et la terreur en Kabylie. Le terme marabout se reflète dans les patroymes kabyles comme Merabet, donc il y aurait un lien avec un toponyme. Vous savez, on va devoir nous occuper de la racine du mot RBT pour essayer d'en savoir plus...
L'oeil sémite
En réalité notre langue devrait être assinie et débarassée des "faux-amis" et des altérations occasionnées par l'influence des sémitiques, de l'arabisation en premier lieu. En kabyle la double voyelle AA est souvent prononcée comme le "ayn" arabe, "ayin" sémitique (hebreu) que l'on transcrit ici par "3" ou "â", comme dans le verbe kabyle aadi, âdi = passer, dépasser (voir aussi s'aadi, s'âdi = fair passer). Il faudrait trouver l'équivalent de ce "ayn" chez nous, quelle lettre aurait-il altéré. Une observation s'impose d'abord en comparant les sémitiques entre elles, l'arabe et l'hébreu:
"
ayin" hébreu en carré ressemble trop au L arabe dans "lam" (en majuscules).
Ceci peut laisser supposer que le 3,â (ayn) serait peut-être un L, surtout que le sémitique ayn-ayin sigifie oeil, alors qu'en kabyle c'est avec un L dans allen "les yeux". D'autre part ce "ayn" aurait d'autres cas altéré une gamma (gh) en kabyle, il faut donc y aller au cas par cas. Aujourd'hui je pense avoir compris et établi avec des exemples concordants que le "ayn" étranger aurait cannibalisé le son R en kabyle, c'est la formule du jour:
Â,3 ~ R, r
Un exemple pour confirmer cette formule. En Kabylie au bon vieux temps les enfants, loin de s'imaginer nabokoviens ou de s'ériger en entomologistes, adoraient les papillons et avaient à la place d'un filet une chansonnette pour capturer ces belles créatures: "baadu, baâdu..." (la suite je l'ai oublié, zut!) Ce terme baadu, baâdu, ba3du pour la papillon va justement nous éclairer. Le papillon est en kabyle apherdTedTu avec la racine FRTT ou FRT; le terme baadu avec la racine B3D ou BÂD avec "R,r" à la place de "3,â" serait BRD sans doute variante plus occulive, plus hard de la racine FRT de papillon. Donc le nom baâdu est simplement une déformation de l'appelation de a-fertetu (papillon) avec le R muté en "ayn" étranger.

Le deuxième exemple pour illustrer cette formule nous parvient du maître avec sa chanson "Ruh avu tabani" (Bu tabani "homme au turban", de facto vieillard/homme âgé) oû taâbani n'est que turban, ce qui laisse penser que c'est un emprunt au français ou aux romanes domestiqué par les kabyles!
Inclinés
Vous avez joué au saut de mouton durant votre enfance? Donc normalement vous devrez connaître la position du mouton, le dos parallèle au sol et, excusez-moi, le cul en l'air!
RedTi = couber l'échine, s'incliner (position du saut de mouton justement)
(excusez-moi si j'offense votre pudeur avec les deux termes suivants:)
a-RadTiw: en kabyle familier terme vulgaire pour désigner le postérieur, le cul.
âadTay (pédé) serait probablement issu de RedTday vu la pose, la version argot DZ du verbe arabe âadti (donner) est aussi envisageable.
Le "dT" ou T emphatique kabyle signifie, on l'a dit à plusieurs reprise ici, la platitude ou plus exactement l'horizontalité, voir même l'inclinaison.
La position du religieux qui fait sa prière rappele celle du garçon qui RedTi au saut de mouton: il courbe l'échine, il s'incline, sauf que le religieux est à même le sol! D'oû la première supposition que RVD ou RBT de amraveDH, merabet signifie "celui qui s'incline".

Rabbins
âabbed en kabyle signifie "adorer " (Dieu, un dieu, une divinité), en arabe le mot âabid signifie "esclave, serf" donc aucune relation. Ce mot avec R à la place du "â" serait Rebbed, qui nous rapproche de Rebbi (Dieu), terme utilisé en kabyle pour désigner Dieu, chez les arabes-musulmans c'est Allah, chez les hébreux Rab ou Rabbin doivent avoir la même origine.
D'oû la deuxième supposition que amravedh, merabet serait l'équivalent de Rabbin, d'homme qui adore Dieu, le serviteur de Dieu, homme pieux dévoué entièrement à la religion et à son Dieu. C'est l'hypothèse la plus probable.

Couchant
Il reste que le mot merabet se reflète dans les patronymes kabyles, mazigh-maures et nord-africains en général; donc il aurait une origine en toponymie. ÂBT ou RBT de merabet serait ÂT (aadT) avec le dT de l'inclinaison, de l'horizontalité, et je suppose, du couchant (dTes = se coucher; iDH = nuit). Notons que cette hypothèse laisse supposer que les racines ÂBT-RBT et ÂT (aadT) sont comparables donc il aurait un B ou P caché dans notre T emphatique (dT). Soit donc le verbe RedTi = Rebti. Inversement amravedh, merabet serait meradT, merad. D'oû la troisième hypothèse, à faible probabilité, je le concède, qui consiste à dire que le terme amravedh, marabet (marabout) aurait un lieu avec "le couchant" (l'occident, l'ouest) qui d'une certaine façon est appuyé par l'origine maure des marabouts - mourabitoune- imravdhen.


Voilà pour ce qui est des marabouts probablement rabbins. Pour le rest cette formule du R à la place du  (ayn) étranger est appliquable ailleurs, dans les patronymes par exemple. Âbbas redevient Rebbas, Âboud - Reboud, Bel Âbbes - Belarbbes (Larbès), etc... On y reviendra une autre fois.