Qu’est ce que la langue? - un moyen de communication. Et c’est tout ? Un moyen de communication, certes, mais seulement un des moyens de communication parmi d’autres. Mais en fait quelle est l’importance de la langue maternelle pour un individu aussi polyglotte soit-il ?
Voilà ce que disait à ce propos l’un des plus grands penseurs ( je dis bien penseur) de l’humanité le russe Fiodor Mikaïlovitch Dostoevskiy. 19ème siècle Russie tsariste, les classes supérieures (aristocrates et bourgeois) et même certains intellectuels utilisaient par souci de noblesse le français tout en méprisant la langue du peuple, la langue russe. Voir « En français ou en russe » ? («Journal d'un écrivain» 1876)
Français ou Russe ?
Pour ce grand penseur, la langue est l’envellope de la pensée et tout individu est sensé penser et réfléchir dans «sa» langue et seule la langue maternelle permet de saisir et d’exprimer la profondeur de la pensée, d’exprimer au mieux sa pensée, de la nuancer.
Pour lui, les plus malheureux sont ceux qui tout en étant dotés de grandes facultés intellectuelles et spirituelles sont obligés de vivre dans la langue d’autrui.
Les autres avec qui le bon Dieu a été moins généreux ne sont pas à plaindre, ils ne se soucient point du fait de vivre dans la langue d’autrui. Ces hommes « aux idées courtes et évolués comme un barbier » ont reçu dès leur jeune âge un « français de bonne » (éduqués par des bonnes françaises ou francophones). Il seront toujours satisfaits de soi surtout (en grands mondains) en prononçant des discours fleuves, de longs speechs avec des idées et des phrases d’autrui, oû il y aurait « plus de noblesse que de sincérité » (en français dans le texte). En sorte, ils feront toujours preuve de fatuité (et de self-satisfaction!). Dostoevskiy rapporte un fait marquant dans un café parisien, au Café de Paris plus exactement, dont fut témoin l’éminent écrivain russe Tourguéniev. Arrive un premier russe, «nouveau» parisien, et commande « Garçon, bifteck aux pommes de terre » (en français dans le texte). Quelque temps plus tard arrive un autre russe, «vieux» parisien celui là, et commande (à la manière de tous les parisiens français de l’époque) « Garçon, bifteck-pommes» (en français dans le texte). Le russe «nouveau» parisien fut pris de panique d’avoir fauté, de ne pas voir appris cette nouvelle manière et d’avoir commandé «à l’ancienne», et là il commence à appréhender que le garçon de salle ne le regarde de travers et avec mépris pour son mauvais français. Dostoevskiy dit à ce propos : En rampant servilement devant les formes de la langue (française) et devant l’opinion du garçon de café, les russes de Paris sont, naturellement, aussi esclaves de la pensée française. De cette façon, ils condamnent eux-mêmes leurs pauvres têtes à un triste sort de ne pas avoir de pensée propre pour toute leur vie, pas une.
On comprend pourquoi Dostoevskiy respectait et adorait même le plus grand poète russe Alexandre Pouchkine (un génie!) qui a donné ses lettres de noblesse à la langue russe. Pour l’anecdote, Pouchkine fut tué lors d’un duel par un...français!
mardi 25 décembre 2007
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